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 A vif

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Derek Reko Sellis

Derek Reko Sellis


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MessageSujet: A vif   A vif EmptyDim 19 Aoû - 21:53

Samedi – 06h43
Derek n’arrivait toujours pas à trouver le sommeil. Vaguement dépité, il alluma son ordinateur pour incarner son personnage d’Empire Anarchy. Il y passa la majorité de sa journée, seulement interrompu par un estomac trop vide ou trop plein.

Samedi – 22h57
J’en ai plein le cul…
Le jeune homme éteignit son pc et resta un moment figé devant l’écran noir reflétant son visage fatigué. Il se demanda s’il était satisfait du train de vie qu’il menait, si la manière dont il utilisait son temps le rendait heureux.
Quelques secondes s’écoulèrent avant que Derek se mette à sourire.
J’sais pas si ce que je vais faire sera utile pour me construire et m’épanouir psychologiquement, mais ce soir, je vais m’amuser un peu.
Puis son sourire disparut. Il n’avait jamais su quoi répondre sérieusement aux questions qu’ils se posaient. Il arriva dans le salon de la belle maison que ses parents avaient commencé à payer depuis une bonne décennie. Sa mère lisait un dépliant politique sur un canapé rouge mat style technologue qui, d’après elle, faisait un beau contraste avec leur télévision holographique. Il n’y avait jamais assez de belles choses au domicile et il n’y avait jamais assez d’argent pour les belles choses. Voilà pourquoi son père quittait rarement son lieu de travail. Ça ou alors il préférait bosser sur ses prothèses plutôt que d’être avec son fils unique et sa femme…
Alors qu’il enfilait ses fidèles rangers dans la véranda, sa mère lui demanda :
-Où vas-tu ?
-Dehors.
Il entendit sa mère s’insurger mais il ferma la porte et se mit à courir en direction... d’ailleurs.

Courir faisait partie des activités que Derek affectionnait particulièrement. Courir remplissait les critères essentiels suivants : sécrétion d’adrénaline et augmentation des globules blancs dans les muscles. Vitalité et douleur. Voilà ce qui lui donnait le sentiment de vivre. Vivre pleinement. Mais parmi ses occupations favorites, il n’y en a une que Derek place au-dessus du reste : se battre.
A l’époque où les gens se battaient tous les jours, où la souffrance, la maladie et la faim étaient le quotidien des hommes, personne ne se plaignait du mal être existentiel. D’après lui, il devait forcément y avoir un lien.

C’est tout naturellement qu’il entreprit de se battre ce soir-là. La principale difficulté était de trouver un adversaire - en dehors du cadre d'un club. Quelques années plus tôt, il avait été étonné de l’acharnement avec lequel les gens refusaient de se battre. Ils s’attachent sûrement à leurs petits principes et sont trop effrayés à l’idée de se faire mal. Ou peut-être y avait-il d’autres raisons que Derek comprenait encore moins.
Fort heureusement pour lui, il pouvait compter sur les hommes de sa génération, souvent défoncés à la drogue ou à l’alcool lorsque la nuit tombe, pour s’échanger quelques mandales. En somme, il fallait qu’il trouve des gens dans un état second. Typiquement le genre de personne que Derek ne fréquentait jamais. Ces gens dont le champ de réflexion est borné dans le triangle étude – amis – famille, ou, à défaut, qui en donnent fortement l’impression. Mais il comprenait ce mode de vie. Après tout, lui passait ses nuits devant l’ordinateur et n’avait pas vraiment l’air d’une tête pensante. Lui et son regard blasé, ses yeux injectés de sang, ses cernes noirâtres et ses traits tirés par l’insomnie.

Putain, je pense trop…

Il avait fait chaud toute la journée. Beaucoup de gens étaient dehors ou sur les terrasses pour profiter de la fraîcheur de la nuit. Peut-être que les jeunes avaient dû faire de même. Derek se dirigea vers un bâtiment dont le vaste garage était connu pour être désaffecté – sauf par les jeunes, du coup. D’après les rumeurs qu’ils entendaient sans trop s’y intéresser au collège grad’, c’était ici que se déroulaient la plupart des fêtes "undergrounds" du coin.

Bingo

Une diarrhée auditive se faisait sourdement entendre lorsqu’il s’approcha de l’infrastructure en question. Signe qu’une fête, d’après la définition de sa jeunesse, avait lieu. Entrer ne posa pas problème. La politique était de laisser tout le monde venir en apportant n’importe quoi. En circulant au sein de la foule, Derek nota la présence de certaines drogues qu’il appréciait. Appréciées car elles faisaient perdre le sens de la réalité au consommateur et le rendait plus vivace. La personne idéale contre qui se battre et avoir un peu de challenge.

La soirée commence…
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Zack O'Graham

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MessageSujet: Re: A vif   A vif EmptyMer 22 Aoû - 20:57

Il faisait une chaleur lancinante, l’été n’en finissait plus. Même quand le soir tombait, l’air restait dense et lourd. Zack soupira en fermant l’enveloppe de son formulaire de réinscription. Et dire qu’il allait falloir marcher jusqu’à la poste…

Calypso était partie en vacances avec Seth, et Zack était seul. Il prit son courage à deux mains, se leva, enfila un t-shirt et sortit. Il était dix heures du soir et le jour avait à peine fini de tomber. Les longues pelouses du campus étaient quasiment désertes. Zack longea le domaine universitaire et s’engouffra dans les rues piétonnes. C’est là que la vie suivait son cours pendant l’été : les terrasses des bars étaient illuminées, pleines de monde, les voix se mélangeaient à la musique. Il trouva vite une boîte aux lettres, y glissa son enveloppe – puis resta immobile.

Autour de lui les gens marchaient, parlaient avec leurs amis. Ils semblaient tous avoir des vies pleines de projets, de rencontres. Tout semblait facile pour eux. Lui, il avait l’impression de traîner son destin à la force du bras, tout seul. Pourquoi ne parvenait-il jamais à nouer avec les autres ? Et merde, qu’ils aillent se faire foutre s’il ne les intéressait pas. Être seul ne l’avait pas empêché de tourner des images, d’écrire un scénario. Ils verraient bien.

Les gens se bousculaient autour de lui, les soirées commençaient à battre leur plein avec le happy hour, et Zack essayait de se dire qu’il valait aussi bien que ces gens, même s’il passait ses journées et ses nuits tout seul devant des films.

Il voulut rentrer chez lui, les emmerder tous, mais il se sentit retenu par une sorte de besoin de socialisation primaire : un instinct lui disait que ce serait comme un échec, un aveu d’impuissance face à sa solitude, que d’aller s’enterrer lamentablement dans son appartement comme il le faisait depuis des semaines. Pour ne pas réfléchir davantage, il pivota sur ses talons et prit la direction du Highway : il connaissait un endroit où on buvait pour pas cher.

*

La musique était forte et l’ambiance alcoolisée. Calé sur une chaise en alu, Zack laissait s’écouler le temps en sirotant sa vodka-pomme.

Comme souvent lors de ses sorties nocturnes, il s’était retrouvé à observer de loin le groupe de gens d’apparence sympathique qu’il aurait voulu aborder. Il avait attendu un moment – un instant de trop – et au moment où il allait se lever, il s’était fait aborder avec insistance par un sombre inconnu. Vous savez, c’est ce genre de mec pas sain, légèrement paranoïaque ou obsessionnel qui vient vous raconter sa vie, et que vous n’osez pas jeter parce qu’il a l’air potentiellement agressif ou dangereux : il y en a toujours un dans une soirée et, ce soir-là, c'était Zack qu'il avait choisi pour victime, le forçant depuis vingt bonnes minutes à écouter avec douleur ses divagations sur les complots internationaux ou sur la douceur des chaussettes tricotées par sa grand-mère...
Il allait falloir trouver un moyen de s’en débarrasser.
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Derek Reko Sellis

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MessageSujet: Re: A vif   A vif EmptyMar 28 Aoû - 21:47

La musique était assourdissante.
Derek se taillait un chemin en jouant des coudes, prenant soin de renverser un maximum de verres. Un geste qui augmentait ses chances de dénicher quelqu’un d’irascible et bagarreur. Le jeune homme était imperméable aux commentaires que les gens faisaient lorsqu’il faisait preuve de ce genre d’incivilité. Il s’en foutait. Ces gens mourront tous un jour et, dans l’immédiat, oublieront son visage le lendemain.
Le bruit dégagé par les amplificateurs monopolisait son système auditif. Derek ne pouvait qu’observer les gens. Ils voyaient les visages défiler au rythme de ses coups d’œil furtifs. Qui allait-il frapper ? Qui serait susceptible de le frapper lui ?
Les projecteurs l’éblouissaient.
Le meilleur sentiment qu’il avait nourrit à l’égard d’autrui était le désintérêt. A d’autres moments, ils avaient l’envie impulsive de tuer tout le monde et de tout brûler jusque aux cendres. Voilà ce que méritaient tous ces sous-produits du mode de vie cyber-technologique. Ils rêvaient d’une destruction immédiate de la société et les créations technopolitaines pour que les gens retournent à l’état de chasseur qui se bat chaque jour pour survivre.
Les remugles de cet endroit l’écœuraient.

HAAA !

Dans un cri rauque et rageur, jambes arquées et torse pivoté, Reko envoya un magistral direct du droit dans le visage de l’homme le plus proche de lui, l’envoyant valser contre un amplificateur, l’arête du nez fracturée. La musique cessa dans cette partie du souterrain. "Combo", lâcha Derek, un sourire carnassier fendant son visage en deux.
Avant même que l’ensemble des fêtards ne réagissent et que Derek relève le blessé – pour le frapper une nouvelle fois, un jeune homme qu’on aurait juré dans la brume léthargique de l’alcool une seconde plutôt se leva d’un bond et s’interposa entre l’agresseur et l’agressé, repoussant dans la foulée un drogué qui s’était agglutiné à lui.
Reko marqua une pause, inhabité à un tel altruisme. Le sauveur inopiné devait avoir deux ou trois ans de plus que lui et semblait tout aussi surpris de la situation qu’il venait de créer. Un cercle se forma autour des quatre individus. Personne ne songea à intervenir. Tout le monde observait un silence nerveux… Tout le monde, à l’exception de l’opiomane susmentionné qui s’adressait toujours à l’homme face à Derek :

Arrête d’pousser moi, mec… Bon. J’disais. T’sais. Les gens i doivent laisser p’sser leur onl…gon… ongles… c’est un signe d’révolte ! Les chats, par exemp’…

La drogue lui ayant fait perdre tout sens de la réalité, le toxico n’avait absolument pas pris conscience de ce qui se passait. Son inaction totale (si l’on exceptait son flot de paroles débiles et insensées), donna tout loisir à Reko de s’approcher de lui et d’armer un coup de pied vertical fulgurant qui lui brisa une côte flottante.

Toi, ta gueule.

Lors de ces mêmes dix secondes, l’adolescent aux narines ensanglantées et cet étrange homme qui avait fait front à Derek avaient pris la fuite dans deux directions différentes. Reko était troublé. Il n’aurait su décrire précisément l’effet qu’avait eu ce rival sur lui.

Il s’élança dans son sillage.

***

hrp : Hum... c'était difficile de décrire la situation sans citer Zack alors voilà, je dévoile les choses plus clairement avec mes talents sans limites de dessinateur :
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Zack O'Graham

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MessageSujet: Re: A vif   A vif EmptyMer 12 Sep - 14:44

Zack courait à travers la foule de danseurs perdus, qui attendaient bêtement debout depuis que la musique avait été coupée. Bousculant tout le monde en s’excusant le plus possible, il se fraya un chemin jusqu’à la sortie. L’air du soir était encore tiède. Certain que l’autre dingue le suivait encore, il s’élança vers une ruelle.

La scène était allée très vite : un mec pas bien vieux qui donne un coup de poing sans raison apparente, la musique qui se coupe, Zack qui s’interpose, l’inconnu bavard qui ouvre sa gueule avant de s’en prendre une lui aussi, le tout pendant que la première victime se fait la malle… Zack avait vite compris au regard de l’agresseur qu’il serait le prochain sur la liste, alors il avait filé.

Encore une loose, une merde dans laquelle il se retrouvait entraîné malgré lui. Pourquoi s’était-il mêlé de ça au fait ? Il aurait juste pu profiter de la confusion pour fausser compagnie au bavard qui lui tenait la jambe, et laisser son actuel poursuivant se livrer au pugilat avec un autre adversaire. Mais non, il s’était levé par réflexe pour intervenir, ça avait été plus fort que lui. Comme quand son père levait la main sur Calypso…

Il chassa les souvenirs d’un revers de pensée, revenant au présent. Il avait tracé vers une rue passante, espérant se fondre dans la foule pour échapper à son poursuivant, dont il avait entendu la course précipitée derrière lui dans la première ruelle déserte qu’il avait traversée. Il ralentit puis se mit à marcher, le plus calmement possible, pour ressembler à n’importe quel passant.

Zack ne sentait plus la présence de l’autre derrière lui. Étrangement, cela ne le rassurait pas. Il se forçait à ne pas se retourner pour chercher l’autre du regard. Il fallait marcher sans avoir l’air de rien… Soudain, une main l’attrapa par l’épaule et l’attira dans une rue mal éclairée.


Zack reconnut immédiatement le jeune type qui avait déclenché la bagarre à la soirée. Mais comment s’était-il retrouvé dans une rue située devant lui alors qu’il courait derrière ? Un rapide coup d’œil à l’impasse lui fit remarquer une échelle de secours : il était probablement passé par les toits. Zack songea qu’il avait la sensation de se trouver dans une scène de film d’action, face à une sorte de ninja. Agissait-il pour le compte d’une organisation secrète ? Peu probable. A moins qu’on veuille faire pression sur son père ? Mais il l’avait semble-t-il choisi au hasard. Alors quoi ? Rien. En tout cas si la scène avait quelque chose d’un film, il fallait trouver une bonne réplique – et vite.

En effet il avait pensé tout cela en une demi-seconde, le temps que l’autre arme son coup de poing : plus le temps de réfléchir. Réagissant une nouvelle fois par réflexe, Zack bloqua le crochet de son adversaire, immobilisant son bras d’une poigne ferme qui l’étonna lui-même, puis lui renvoya un coup en pleine figure. L’autre recula de quelques pas, sonné.

« T’as vraiment rien d’autre à foutre ? » lâcha Zack.
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MessageSujet: Re: A vif   A vif EmptyLun 1 Oct - 21:28

Derek ne s'était pas attendu à cela. Il s'était mordu la langue. Le fluide écarlate glissait sur sa langue, répandant dans son cerveau le goût du sang. Son rythme cardiaque s'accéléra. Son esprit se vida de toute pensée. C'était agréable...
Puis il entendit Zack lâcher soudainement :

« -T'as vraiment rien d'autre à foutre ?
-Non ! Rien du tout ! répondit-il rapidement, tout souri. »

Son sourire s'effaça lorsqu'il réalisa que l'autre tentait lui passer à côté pour regagner l'avenue. Sans hésiter, Derek se déplaça légèrement dans sa direction, pivotant sur son pied d'appui et envoya tout le poids de son corps dans sa jambe pour faucher sa cible au niveau des cotes, l'envoyant valser plus loin dans la ruelle.

Derek jubilait. Il le tenait cet homme qui avait preuve d'une force et d'une rapidité intéressante. Il fallait le faire recommencer. Il fallait qu'ils s'amusent plus longtemps.
Il s'approcha de lui en sautillant, la langue pendante :

« -Allez, mec ! Frappe moi encore ! »
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Zack O'Graham

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MessageSujet: Re: A vif   A vif EmptyLun 1 Oct - 21:29

Le type sautillait sur place, les poings en mouvement comme un boxeur, et il réclamait qu’on le frappe. Quel excité... Zack, lui, se tenait les côtes en se remettant vaguement d’aplomb, écroulé contre le mur.

« Putain mais c'est quoi ton trip ?... lâcha-t-il entre deux respirations douloureuses. J'veux pas me battre, moi.
- Mais tu m’as frappé, non ?
- J'me défendais.
- Et tu t'es interposé au garage. Pourquoi ?
- Je… J’sais pas. Réflexe. »

Maintenant le gars lui tournait autour, sourire provocateur aux lèvres :

« Ah ouais, en fait tu te la joues super justicier au service des innocents. Monsieur est héroïque ! »

Zack soupira :

« Bof, si seulement ! »

À ces mots il vit les pieds de son adversaire cesser de sautiller, et il y eut un silence comme si l’autre gars s’était un peu…calmé ?


Dernière édition par Zack O'Graham le Lun 1 Oct - 21:31, édité 1 fois
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Derek Reko Sellis

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MessageSujet: Re: A vif   A vif EmptyLun 1 Oct - 21:31

Quelle lassitude…

Cet homme, accroupi contre le mur, la tête fixant le sol, avait l’air désolé de lui-même. Cette image le renvoyait à lui-même. Il n’aurait su expliquer comment ni pourquoi. Beaucoup de temps s’étaient écoulé depuis qu’il avait cessé d’affronter le comment et le pourquoi dans la vie. Les choses étaient puis mourraient. Seules les actions comptent. Pour une certaine durée.
Toutes ses pensées s’étaient enchaînées très vite dans la tête de Derek, sapant son énergie en quelques secondes. Il était d’une toute autre humeur à présent.

« - Ben tes actes parlent pour toi, non ? » Derek aperçu avoir baissé et adopté un ton sincèrement interrogateur.
« - Mouais... dans ce cas j'agis pas assez souvent… »

Derek s’était approché de Zack et s’affaissa le long du mur jusqu’à se retrouver assis à ses côtés. Cette soirée prenait une tournant inattendu.
« - Moi, quand j’agis, je tape des gens... Je sais pas si c’est mieux… »

Un silence se posa. Les deux hommes échangèrent un regard avant de fixer le sol, songeurs.
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MessageSujet: Re: A vif   A vif EmptyMar 30 Oct - 11:24

La ruelle était toujours silencieuse et les deux garçons passifs. Zack songeait à l’incongruité de la situation, redescendait de la peur qu’il avait eue de se faire casser la gueule. Il songeait aussi que le danger lui avait donné la sensation d’être vivant, et qu’à présent il se sentait vide.

« Est-ce que tu croies que la vie a un sens ? » marmonna-t-il.

L’autre ne dit rien.

« J’m’appelle Zack.
- Derek.
- Ça te dit de boire un verre ?
- Bof… »
*

« Un, deux, trois ! »

Derek et Zack avalèrent cul-sec leurs shoots de tequila, et leurs verres vidés claquèrent en même temps sur le comptoir.

« Barman ! Un autre ! » réclama Zack.

Et voilà qu’il se perdait à nouveau dans l’alcool. Zack considéra son camarade de déboires (ou de boire) et songea que ce gamin de dix-huit ans était encore plus paumé que lui.

« J’dois tourner un documentaire, continua d’expliquer Zack. Mais tous les sujets me font chier. »

Derek hocha la tête, ailleurs. Puis il sembla percuter.

« Tu pourrais filmer des alcooliques, t’as l’air de t’y connaître ! » suggéra-t-il goguenard, avant d’avaler sa boisson puis de s’écrouler sur la table. « Putain ça faisait un siècle que je m’étais pas bourré la gueule. C’est vraiment ignoble comme sensation. T’aimes ça toi ?
- Ouais j’adore oublier ma propre médiocrité. Mais là j’suis encore trop sobre, déplora Zack en avalant son verre. Barman ! Deux bières et encore deux shoots.
- J’t’ai déjà dit j’aime pas la bière, intervint Derek.
- Je sais. »

Les deux bières arrivèrent et Zack prit une gorgée de l’une puis de l’autre. Le barman déposa les shoots et Zack s’enfila immédiatement le sien. Derek, pataud, hésita une seconde avant de boire son verre.

« En fait t'es bien plus grave que moi, mec, dit-il en se levant. Viens, y'a plus intéressant à faire que finir sous la table...
- Attends, attends, » dit Zack.

Il vida tour à tour les deux bières, puis se leva en abandonnant un billet sur la table, un peu chancelant, et suivit Derek au dehors.

L’extérieur lui fit l’effet d’un coup de vent sur une peau mouillée, ou d'un chewing-gum trop frais.

« Tu veux aller où ? demanda-t-il, étrangement alerte.
- Chais pas, fit Derek. Ailleurs.
- Vas-y montre-moi un endroit que t’aimes bien. »

Derek sembla réfléchir un instant puis :

« Ok, par là. »

Zack lui emboîta le pas, dégainant sa caméra de poche qu’il enclencha. À l’image, un jeune homme sombre avançait de dos le long d’une rue mal éclairée, croisant les silhouettes indistinctes de fêtards égarés.
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MessageSujet: Re: A vif   A vif EmptyDim 30 Déc - 23:36

Le hangar était sombre, et vide. Zack ne comprenait pas. Derek venait de le faire marcher ¾ d’heure, traverser tout le Highway jusqu’à atteindre la Ceinture, bordure isolée et presque inhabitée de la ville volante, tout ça pour visiter un hangar désert ?

Pendant notre marche, ma caméra avait pu capter quelques belles séquences. Dans les ruelles noires et solitaires j’avais campé mon personnage, Derek, figure de l’ombre errante et brutale. Sur les boulevards éclairés de lampadaires et de néons, où circulaient encore quelques noctambules, je l’avais filmé bousculant sans ménagement ces passants esseulés, provoquant plusieurs accrochages et débuts de bagarres que les adversaires fuyaient vite, à sa grande frustration. Il m’avait aussi fait passer par les toits, m’offrant des images panoramiques de Cyberpolis endormie, à trois heures du matin, une heure où seules les grandes artères sont densément éclairées tandis que la plupart des tours sont plongées dans l’ombre…

En entrant dans ce hangar, la caméra toujours au poing, je songeais aux plans que je venais de tourner. Ils n’étaient pas tous exceptionnels, mais il me semblait que beaucoup en valaient la peine, et que certains étaient même potentiellement très bons. Surtout, je sentais confusément que tous étaient porteurs d’une atmosphère particulière, d’une certaine étrangeté. J’avais joué sur le clair-obscur, sur des mouvements en suspension, sur le silence… Quelque chose me disait que j’avais là une matière inhabituelle, quelque chose de singulier – une matière, peut-être, apte à esquisser un portrait nocturne de la Citadelle.


Derek n’avait pas dit un mot. Depuis le moment où Zack lui avait demandé de l’emmener quelque part et avait sorti sa caméra, il était resté plus silencieux qu’une tombe. Sans même se retourner vers son camarade pour l’inviter à le suivre, il s’éloigna vers le fond du hangar. Zack le suivit sans hésiter, ne le lâchant pas d’une semelle, s’enfonçant à sa suite dans l’ombre pour ne pas le perdre de vue, à l’écran.

Je voulais savoir où il m’emmenait. J’espérais que la réponse ne serait pas ‘nulle part’. Derek était peut-être juste un taré, et il m’emmenait au fond de ce hangar pour me tabasser discrètement…

Ils s’avancèrent pas à pas sur le béton nu. Bientôt, ils ne virent plus rien tant l’endroit était sombre. Zack était faiblement éclairé par l’écran de sa caméra, mais tout autour de lui c’était le trou noir. Il se demanda comment Derek pouvait savoir où il allait, dans cet espace sans limites. Lui, il se repérait en suivant le bruit des pas et de la respiration de son compagnon. Soudain il y eut une rafale de vent, probablement venue du ciel au-delà de la Ceinture, et elle siffla entre les parois de ferraille, on entendit des craquements, les grincements sinistres de poutres en métal. L’ambiance était effrayante, mais à mon propre étonnement je ne ressentis pas une once de peur. Son pouls était régulier, son esprit clair, sa marche calme… Cela devait venir de la caméra : derrière elle, il se sentait invulnérable. C’était un phénomène étrange de mise à distance, comme si l’écran, interface entre lui-même et la réalité, le protégeait de tout ce qui pouvait advenir. La caméra faisait de lui le spectateur de ses propres actions, transformait les lieux en décors, les êtres humains en personnages de fiction, et la peur de souffrir en léger suspense.

Les pas de Derek se mirent à résonner d’un écho nouveau. Zack fit pivoter l’écran de la caméra de manière à éclairer devant lui : Derek était en train de descendre un escalier. S’auto-flagellant mentalement de ne pas avoir eu l’idée de pivoter son écran plus tôt pour voir ce qu’il filmait (et où il foutait les pieds), Zack entreprit de descendre lui aussi l’escalier. Arrivé en bas, il vit que Derek était déjà au bout d’un étroit couloir… en train d’ouvrir une porte.
Enfin, un rai de lumière entra dans le champ, immédiatement suivi d’une rumeur sourde de voix entremêlées et de musique. Zack, tout excité, réajusta son cadrage. Le suspense s’accroissait, le mystère se densifiait : sous les ténèbres d’un hangar désert, une porte s’ouvrait sur des sons et lumières. C’était une entrée dans un monde souterrain, quelque chose de caché, encore une facette du visage nocturne de la Citadelle…

Pour une fois Derek attendit que Zack l’ait rejoint, et il daigna même lui glisser un mot en chuchotant :
« Là-dedans personne n’a le droit de filmer, alors fais-toi discret si tu veux pas d’emmerdes. »
Les deux garçons échangèrent un regard. Derek ne plaisantait pas. Zack planqua sa caméra sous son blouson, la tenant d’une main à travers sa poche. Puis Derek ouvrit grand la porte, et ils entrèrent.

*

C’était une arène de combats illégaux. Il y avait une foule d’hommes de tous âges, de tous milieux, amassés autour de l’espace où devaient se mouvoir les combattants : hommes ? bêtes ? Vérifiant que personne ne m’observait, je sortis rapidement ma caméra pour prendre une vue d’ensemble et un plan de Derek se frayant un passage dans la foule, puis je la planquai fissa. L’endroit était bas de plafond, mal éclairé, bondé, la musique lourde excitait les nerfs et les voix hurlaient des encouragements violents. Je repérai un ou deux gars planqués, probablement les bookmakers…

Tâchant de tenir sa caméra de manière à obtenir quelques images, même très floues, Zack prit une inspiration, puis plongea dans la foule des spectateurs. Il fallait atteindre le ring, il était curieux. Il essayait de se persuader que ce genre de pratiques le répugnait, qu’il était là pour filmer la réalité brute, mais c’était plus fort que lui, il voulait voir le combat.

C’étaient deux hommes. L’un d’eux avait un bras en métal et une visière cybernétique, le genre de truc qui te permet de voir dans le noir, d’augmenter ton acuité visuelle, et le reste de son corps était puissamment musclé. Son adversaire ? Un mage. C’était indubitable au vu de son pourpoint, de sa cape, de ses bottes et… des tourbillons d’eau qui se mouvaient autour de lui. En théorie les seuls mages acceptés à la Citadelle sont ceux que les autorités ont jugés convenables, le plus souvent parce qu’ils contribuent à des recherches scientifiques ou à un développement culturel… Mais je doutais fortement que ce mage-là soit du genre à obtenir une autorisation de séjour. En observant plus attentivement la foule des spectateurs, je m’aperçus que certains étaient eux aussi probablement mages ou alchimistes, au vu de leurs accoutrements…

Le cyber-modifié tournait autour de sa proie, guettant le moment propice, l’élémentaliste semblait sûr de lui. Soudain, le flux d’eau se cabra, s’abattit, devint un fouet de glace et cingla l’adversaire. La peau s’entailla sous les assauts répétés des flux glacés, que le cyber parvint pourtant à briser plusieurs fois. Furieux, il se jeta sur le mage. Il le plaqua contre les cordes du ring en l’étranglant, lui défonça le ventre d’un coup de poing métallique. Zack était fébrile, il filmait tout, sa caméra glissée entre deux spectateurs du premier rang, l’écran pivoté vers le haut pour voir le cadre qui bougeait sans arrêt dans la bousculade constante du public… Mais il devait souvent lever les yeux pour regarder le combat de visu, pour vérifier qu’autour de lui personne ne l’observait, et dans ces moments-là plus rien ne le séparait de la réalité, de la violence des coups enchaînés, lourdement écrasés, du sang, des hurlements des parieurs.

Finalement le combat fut interrompu dans un grand bouhaha. Le cyber-modifié n’avait plus de bras : l’eau s’était infiltrée entre les jointures, entre les circuits, puis avait soudainement gelé, faisant imploser le membre, envoyant des éclats de métal dans la chair de l’homme, qui avait hurlé en s’écroulant. Tous les coups étaient permis. Le mage était vainqueur. Il sortit du ring sous les applaudissements et les huées, s’entourant d’une bulle de glace qui fit reculer les parieurs mécontents qui avaient joué contre lui.

Un technologue d’une trentaine d’années vint se mettre au centre du ring, équipé d’un porte-voix électronique, habillé façon arbitre de boxe en veston – à l’image, j’en fis un personnage old school en le cadrant bien centré, en contre-plongée. Après avoir chauffé la salle, il présenta les adversaires suivants : un alchimiste transmutateur surnommé ‘Le Défracteur’ affronterait… Derek.

*

Zack sentit le réel se densifier. Sur l’écran de sa caméra, son protagoniste entrait en scène, et risquait peut-être sa vie… Son attention se relâcha, absorbée par l’image de Derek qui crevait l’écran, comme au ralenti. Quand il releva les yeux, l’arbitre technologue était debout devant lui.

« Eh toi ! Qu’est-ce que tu fais !? » cracha-t-il à Zack en avisant la caméra.

Se reprenant soudain, Zack ferma promptement l’écran de sa caméra et la glissa dans sa poche.

« Rien je…
-Tu filmes depuis combien de temps au juste ? »

Zack sentit le piège se refermer, il recula dans la foule, l’arbitre passa entre les cordes, dégainant un couteau, et s’élança à sa poursuite – Zack n’en demanda pas plus, il prit la fuite.

Très vite il fut hors de la foule, il esquiva un bookmaker qui tentait de lui barrer la route, se jeta sur la porte et la claqua derrière lui. Il grimpa les escaliers quatre à quatre, à l’aveugle. Courant vers la sortie d’où provenait la lumière de la rue, il traversa le hangar vide, se précipita dehors. Il hésita une seconde à courir droit devant lui, mais choisit finalement de longer la façade du hangar et se planqua derrière l’angle. Bon choix. Quelques secondes plus tard, le bookmaker et l’arbitre débarquaient : ils fouillèrent les rues juste en face, mais ne se préoccupèrent pas de celle de derrière. Après un moment (qui me sembla une heure) de recherches infructueuses, ils retournèrent bredouilles à l’intérieur, jurant. Moi je restai là, tétanisé, le souffle court, l’adrénaline coulant à flot dans mes veines.

L’écran ne protège pas du réel. Un personnage que j’avais cru mettre en scène avait fini par me courser, arme au poing. Au moins, j’avais appris que les ruses dans les thrillers de courses poursuites fonctionnent à peu près…

Sortant de sa cachette discrètement, les mains enfoncées dans les poches, Zack s’éloigna vers les ruelles pour rejoindre le centre-ville, pour rentrer chez lui. Mais ses pensées, elles, restaient en arrière, tournaient autour de ces images qu’il avait vues, capturées, de ce monde de la nuit, souterrain, qu’il avait aperçu. Il pensait aussi, en essayant d’oublier sa propre lâcheté, à Derek, et il espérait que le gamin s’en tirerait bien.

En m’éloignant, je savais déjà que j’y reviendrais. Pas là, pas dans cette arène exactement, mais dans le monde underground en général. D’une manière ou d’une autre, c’était cela que je voulais filmer, que je voulais dire. Ce serait ça mon sujet, mon histoire.

La nuit.



(à suivre dans >Le jour et la Nuit<)


Dernière édition par Zack O'Graham le Mer 2 Jan - 1:52, édité 3 fois
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Siècle & Oxford

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MessageSujet: Re: A vif   A vif EmptyLun 31 Déc - 15:39

Oxford éjecta le CD, le mit dans une boîte que Siècle rangea dans son sac, éteignit tous les appareils et rabattit l'écran de son ordi. Puis ils se levèrent, se rechaussèrent et descendirent dans le magasin ou papa Datah sortait d'un carton une pile de vinyles en édition limitée, tandis que Sanka, le petit frère, debout sur un tabouret au fond du local passait avec précaution un chiffon doux sur les Stratocaster. Il sauta à terre et courut vers Oxford qui lui passa la main dans les cheveux en guise de salut, échangea un fistbump avec Siècle et s'en retourna à sa tâche en remettant ses tresses en place.

Une fois sur l'avenue les deux compères eurent juste le temps de sauter dans le tram qui les amèneraient jusqu'à la Ceinture, où Scott et Kim devaient les rejoindre. L'ambiance dans laquelle ils allaient se plonger n'était pas franchement du goût de Tiên, ni de Doàn. Kim, elle, avait surpris tout le monde le jour où elle avait annoncé qu'elle assistait régulièrement aux combats : il faut avouer qu'au début, ses perruques pastel, ses lentilles de couleur et ses accessoires Kawaii lui avaient donné des difficultés à entrer. Au final, elle ne s'y présentait plus que dans son « état naturel ».

La nuit venait juste de tomber quand Siècle et Oxford descendirent. Le tram s'était vidé à la station d'avant ; la Ceinture était tout aussi déserte. Le goudron humide des fuites d'égout reflétait la lumière jaunâtre des lampadaires ; une gouttière perdait son eau, ajoutant au craquement des tôles rouillées un petit bruit régulier. Ils attendirent au milieu de la route cinq bonnes minutes, faisant des va-et-vient aléatoires, quand des bruits de pas en crescendo se firent entendre. Deux silhouettes apparurent au coin de la rue, rasant le mur sale. Ils se regroupèrent et alignés tels les Dalton s'engouffrèrent sans hésitation par l'espace étroit entre les deux immenses portes du hangar.
D'un seul geste ils sortirent leurs portables pour éclairer leur pas ; réflexe banal mais inutile : ils connaissaient le chemin par cœur.
Ils gagnèrent l'escalier puis la porte, on leur ouvrit, ils s'avancèrent dans l'espace déjà bondé et étouffant. Oxford s'éloigna un instant pour aller saluer le DJ, puis gagna le bord du ring où les autres s'étaient déjà fait une place et avaient engagé diverses conversations.

« Hey ! Elle est où Siècle ?! »
« Elle est allée faire ses paris ! » répondit Kim d'une voix forte pour se faire comprendre par dessus le bruit. A ce moment l'intéressée revint, sourit et rangea une poignée de tickets dans sa poche.

La soirée avançait au rythme de la cloche, de la musique pesant sur la foule comme une dalle de béton, de la chaleur étouffante, de la sueur, des hurlements, de l'alcool. Siècle hurlait comme une enragée, son poing tendu avec ceux des autres, encourageant son favori à chaque round, joignant sa voix à la clameur qui s'élevait à chaque coup. Kim, moins véhémente, s'était laissée emportée dans la liesse générale, un verre à la main. Scott sautillait sur place en tendant les poings, coincé dans la vague de spectateurs, et Oxford, calme et impassible, accoudé à la barrière à côté de Siècle, observait les combats avec un sourire en coin, observant de son œil rouge les attitudes des opposants.

Le duel le plus attendu commença. Un homme au bras bionique gonflé aux hormones contre un élémentaliste d'eau. Oxford leva un sourcil et se pencha contre Siècle pour lui parler dans l'oreille.
« T'as misé sur qui ? »
« Le mage ! »
« Je m'en doutais ! »
« Crois moi, malgré notre arrogance, nous cybers ne pouvons rien contre la magie ! J'en sais quelque chose ! Les flux sont tellement puissants que trois générations de béton n'en viennent pas à bout ! »
« Hé, hé... »

Oxford émit ce petit rire caractéristique de sa personne, et qui servait pour tout état d'âme. Le jeune homme était plutôt avare en expressions faciales... Siècle néanmoins savait le décoder et répondit à ce rire par un coup de coude et une grimace. Le combat prit fin au bout de quelques intenses minutes, Siècle jeta un regard satisfait à Oxford et son regard dériva sur la foule du côté droit du ring. Elle s'arrêta sur un type plus grand que les autres, qu'elle n'avait jamais vu avant. Il semblait fasciné par ce qu'il voyait ou inquiet. Elle n'aurait pas pu détailler son visage avec précision : la moitié était cachée sous une masse de cheveux noirs. Siècle se demanda si le côté négligé de sa coiffure était volontaire ou pas. Tandis qu'un jeune homme à l'air aussi sinistre que rempli de haine montait sur l'estrade face au Défracteur, Siècle remarqua quelque chose. Elle donna un coup de coude à Oxford et désigne l'homme du menton.

« Regarde son blouson ! »

Un objectif planqué dans le manteau. Siècle émit un sourire narquois. Oxford se tourna vers elle, une lueur amusée dans l'oeil.

« Lui, il va pas regretter d'être venu ! »

Ils éclatèrent de rire en observant d'un air hilare l'arbitre l'accoster, puis le pauvre gars prit les jambes à son cou et s'enfuit à travers la foule. Un autre homme prit la place de l'arbitre, et le combat suivant s'engagea. Mais Siècle n'était plus aussi concentrée... Scott se pencha vers eux :

« Il manquait pas de cran celui-là ! Je crois qu'on le reverra pas de sitôt ! »
« Ouais ! » répondit Siècle tandis que Kim, un peu pompette, les rejoignait. « Mais moi j'aimerais quand même savoir qui c'est... Faut avoir des couilles pour entrer ici avec une caméra ! »
« Ou manquer sérieusement de cervelle » trancha Oxford en s'allumant une cigarette.
« Ben, il a pris un sacré risque ! »
« Ouais, et à cause de lui toute la communauté est menacée maintenant ! » intervint Scott en fronçant les sourcils. Oxford lâcha quelques ronds de fumée qui vinrent se fondre dans la couche stagnante formée au plafond par les centaines d'autres cigarettes.
« Rhooo de suite... Relax, les gens. Il doit être en train de se vider dans une bouche d'égout, là... et sa caméra passée par dessus bord. »

Les derniers mots d'Oxford tirèrent une moue contrariée à Siècle, puis les quatre compères reportèrent leur attention sur le ring.
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